La France et le saut de haies, une histoire d’amour ?

Mais d’où peut bien venir cette passion française, si tant est qu’il en existe une, pour le saut de haies ? Eh bien tout simplement des performances historiques des hurdlers tricolores qui, depuis 1950, s’imposent un peu partout dans le monde.

Le hurdling à la française, une tradition d’excellence

C’est depuis les années 1950 qu’une particularité bien française s’est révélée au monde : une prédominance des athlètes tricolores dans les épreuves d’obstacles sur piste. En émane une tradition et une approche unique, s’inspirant du penchant national pour la créativité. Mais pourquoi les athlètes français choisissent-ils souvent des disciplines plus techniques ? Selon Ladji Doucouré, champion du monde du 110 m haies en 2005, cela fait écho – attendez-vous à être surpris ! – à l’amour français pour… l’opéra et l’art ! Car, vous ne l’aurez peut-être pas remarqué, mais le franchissement d’obstacles incarne une nature artistique, comparable à une dance, un équilibre entre force et finesse.

Cette affinité ne se limite pas à l’athlétisme. Doucouré compare le succès des hurdlers français à celui de l’équipe nationale en équitation et escrime – des sports où la précision et la technique sont essentielles. Que ce soit pour franchir des barrières en athlétisme, esquiver des touches en escrime ou maîtriser l’art des relais, la France brille par une approche subtile et raffinée, qui met en valeur une longue tradition d’excellence dans ces disciplines. On le voit bien sur les courses du champion de France en titre Wilfried Happio par exemple : la moindre erreur technique aussi petite soit-elle, peut changer le cours d’une course. A l’inverse, une maîtrise parfaite permet de décrocher parfois les meilleurs chronos de la saison.

Guy Drut, le pionnier du 110 m haies

Il y a ces noms qui résonnent dans l’histoire, des pionniers qui ont posé les premières pierres d’un édifice. En athlétisme, la France a vu naître de grandes figures dans le saut de haies : il suffit de remonter le fil du temps jusqu’aux années 1940 pour voir briller des noms comme André-Jacques Marie, Marcel Duriez et Pierre Schoebel. Mais une étoile brille un peu plus fort, celle de Guy Drut ! Evoquer la discipline du 110 m haies en France sans mentionner Drut, c’est un peu comme évoquer Paris sans sa Tour Eiffel. Tout simplement inimaginable ! Champion olympique en 1976 et détenteur du record du monde en 1975, Guy Drut est bien plus qu’une figure emblématique de la discipline, c’est une véritable source d’inspiration : « C’est lui qui écrit les lettres de noblesse de ce sport en France et qui a créé des vocations », confie Stéphane Caristan, une autre légende du 110 m haies.

A la jonction du cinéma et de l’athlétisme

La France a eu la chance d’avoir des mentors visionnaires que sont Jacques Piasenta et Fernand Heurtebis, deux entraîneurs de renom qui ont tracé la voie en s’attaquant à la technique. Leur source d’inspiration ? Rien de moins que l’Allemagne de l’Est, la référence de l’époque, où ils ont puisé de précieux enseignements en biomécanique. Renaud Longuèvre, ancien coach de Ladji Doucouré, souligne l’importance de cette documentation : « Tout ça a été mis par écrit. Il y a des observables pour tous les entraîneurs, c’est-à-dire des éléments à ne surtout pas rater, comme, par exemple, la position de la jambe de réception, qui doit être tendue. Piasenta a été pionnier en élaborant des situations pédagogiques en entonnoir, c’est-à-dire des exercices où tu ne peux t’en sortir qu’en produisant la bonne technique ». Mais la véritable innovation viendra de la passion de Jacques Piasenta pour le 7e art, ce qui lui a permis de créer des « kinogrammes », des séquences qui décomposent étape par étape le passage d’une haie.

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